Pendant que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou
continue de tempêter et de prendre ses grands airs au sujet de la menace
existentielle posée par un Iran détenteur – peut-être, un jour – de
l’arme nucléaire, Israël a pris livraison du dernier de ses sous-marins
de pointe allemands capables de transporter des ogives nucléaires.
Le coût de ces sous-marins est lourdement subventionné par le
contribuable allemand dans le cadre de l’aide militaire constante de
l’Allemagne à Israël. Selon les révélations du journal Der Spiegel,
Angela Merkel aurait tenté de conditionner la livraison des sous-marins à
diverses contraintes, « incluant l’exigence qu’Israël cesse sa
politique de colonisation expansionniste et permette l’achèvement d’une
station d’épuration située dans la bande de Gaza et partiellement
financée par l’Allemagne ». Aucune de ces conditions n’a été remplie,
mais la livraison s’est poursuivie.
Le secret le moins bien gardé du monde
Depuis des décennies, l’existence de l’arsenal nucléaire israélien
est de notoriété publique, en partie grâce aux informations fournies par
Mordechai Vanunu, toujours privé de sa liberté bien qu’il ait déjà
purgé une peine de dix-huit ans. Le Centre d’études pour la non-prolifération a rapporté qu’Israël
dispose vraisemblablement de quelque 300 ogives – presqu’autant que le
Royaume-Uni. Cela comprend une gamme d’armes thermonucléaires à portée
intercontinentale et des armes tactiques d’artillerie à rayonnement
renforcé (« bombes à neutrons »). Les installations nucléaires israéliennes incluent le réacteur
nucléaire de Dimona, situé dans le Néguev et où travaillait Vanunu, les
bases de stockage nucléaires situées à Eilabun, près du lac de
Tibériade, et le laboratoire national de test d’armes de Soreq, au sud
de Tel Aviv. Israël a toujours refusé de confirmer ou d’infirmer leur existence :
c’est ce qu’Avner Cohen, auteur d’Israël et la bombe, appelle une
politique du « ne demandez pas, ne dites pas ». Evidemment, aucune
inspection de ces installations par l’Autorité internationale de
l’énergie atomique n’a été autorisée. Tant les Etats-Unis qu’Israël ont intérêt à maintenir la fiction
qu’Israël n’est pas une puissance nucléaire (ou que, s’il l’est, les
Etats-Unis n’ont en pas connaissance) : la loi américaine interdit
expressément l’aide économique et militaire aux nations qui acquièrent
la technologie de l’enrichissement nucléaire à des fins militaires. Il
existe cependant une clause dérogatoire stipulant que le président peut
autoriser une telle aide dans « l’intérêt vital » des Etats-Unis. L’arsenal impressionnant d’Israël comprend des missiles Jericho III,
lesquels peuvent transporter des ogives nucléaires et sont également
capables d’atteindre quasiment toute l’Europe et une grande partie de
l’Asie. Le véhicule de lancement spatial Shavit a une portée d’au moins 4
500 km, et Israël a développé un certain nombre de missiles de
croisière, tels le Gabriel 4, un missile de croisière antinavire, et le
Popeye Turbo, qui peut être déployé sur des sous-marins. Les avions de chasse d’Israël, du F-15 au F-16I, sont capables
d’opérations de longue portée avec des ogives nucléaires et chimiques.
L’apport des sous-marins allemands Dolphin complète la capacité
maritime, terrestre et aérienne de ces ogives nucléaires israéliennes.
Le soutien occidental
La réticence d’Israël à informer de ses réelles capacités nucléaires
n’a pas été remise en question dans les milieux politiques et les médias
occidentaux. Non seulement peu de questions ont été posées, mais pendant des
décennies, les pays occidentaux ont coopéré de façon active au programme
nucléaire d’Israël. C’est la France qui a construit le réacteur
nucléaire de Dimona dans les années 1950, utilisant l’eau lourde fournie
par la Grande-Bretagne, la Norvège et plus tard les Etats-Unis. Pendant
des années, Israël a collaboré étroitement avec le régime sud-africain
au développement d’armes nucléaires, et cela jusqu’à la chute de
l’apartheid. L’aide militaire américaine à Israël, d’un montant de 100 milliards
de dollars depuis 1962, s’élève désormais à une moyenne de 3 milliards
de dollars par an, outre les milliards provenant des ventes d’armes.
Cette aide prend en grande partie la forme d’armes conventionnelles
telles que des avions de combat et des missiles sol-air ; mais une
grande partie de cet armement peut constituer un système de lancement de
missiles nucléaires. Par exemple, les récents programmes d’aide ont
inclus des missiles à capacité nucléaire Harpoon, lesquels équiperont
les sous-marins allemands. L’acquisition clandestine par Israël de la technologie nucléaire des
Etats-Unis et d’autres pays a fait l’objet de diverses révélations
journalistiques. Mais l’étendue de la collusion de ces gouvernements et
de leur consentement à ces transferts de technologie ne sera
probablement jamais connue. Ce soutien massif contraste avec l’attitude occidentale vis-à-vis de
l’Irak. La simple – et complètement fallacieuse - suggestion que l’Irak
possédait des armes de destruction massive a signifié pour ce pays vingt
ans de sanctions paralysantes et de bombardements intensifs,
aboutissant à une sanglante désintégration politique à laquelle nous
assistons encore aujourd’hui. Israël possède des armes nucléaires et chimiques en abondance, mais n’est absolument pas tenu pour responsable.
Le rêve d’un Moyen-Orient dénucléarisé
Dans un effort visant à enrayer la propagation des armes nucléaires
et encourager les Etats nucléaires à y renoncer, une conférence
internationale a lieu tous les cinq ans dans le cadre du Traité sur la
non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Le TNP a été signé par
tous les Etats du Moyen-Orient (y compris l’Iran), à l’exception
d’Israël. La conférence du TNP de 2010 a conclu qu’une conférence
régionale devrait avoir lieu en 2012 afin de discuter de la possibilité
de faire du Moyen-Orient une région exempte d’armes de destruction
massive. Ban Ki Moon a exhorté Israël à y participer. Ce dernier a sans cesse tergiversé et cette idée de conférence a
finalement été mise de côté - même si elle peut être relancée lors des
discussions du TNP se tenant cette année, du 27 avril au 22 mai, au
siège de l’ONU à New York. Peut-être par exaspération, l’Assemblée
générale des Nations unies avait massivement adopté en 2012 une
résolution appelant Israël à permettre l’inspection de son programme
nucléaire. Ceux qui ont voté contre étaient les suspects habituels :
Israël, les Etats-Unis, le Canada, les Iles Marshall, la Micronésie et
Palau.
Qui participe à cette course aux armements ?
L’accord de principe négocié entre les Etats-Unis et l’Iran sur le
programme nucléaire iranien a été chaleureusement accueilli par la
communauté internationale, à l’exception des jusqu’au-boutistes
sionistes aux Etats-Unis. Netanyahou, avec ses prédictions de Cassandre,
s’est une fois de plus trouvé isolé. Avec une indubitable et
inconsciente ironie, il a soulevé le spectre d’un Iran déclenchant une
« course aux armements nucléaires » au Moyen-Orient. Le seul cheval de cette course est, jusqu’à présent, Israël. Il est
également l’Etat le plus belliqueux de la région, ayant à plusieurs
reprises attaqué, envahi et occupé ses voisins les plus proches,
annexant les territoires de certains et bombardant les territoires
d’autres, y compris vraisemblablement l’Iran lui-même.
Alors qu’Israël
persiste dans cette politique, il est en effet compréhensible que ses
voisins puissent souhaiter obtenir leur propre force de dissuasion.
* Hilary Wise est écrivain, universitaire et activiste. Elle a également été pendant huit ans journaliste au Palestine News.
28 avril 2015 - Middle East Eye - Vous pouvez consulter cet article à : http://www.middleeasteye.net/column...
Traduction : MEE - Hassina Mechaï
Info PalestineTraduction : MEE - Hassina Mechaï
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