Par méconnaissance des mécanismes qui conduisent au terrorisme, les
mesures législatives et policières fébrilement mises en place pour
lutter contre ce fléau aboutiront au résultat exactement inverse de
celui espéré : une recrudescence des actions terroristes.
Henri Laborit ,
(photo) chirurgien et neurobiologiste spécialiste des comportements humains,
aurait sans doute maille à partir avec nos autorités d’aujourd’hui s’il
répétait son explication du terrorisme
« On devient terroriste, parce que l’on n’est pas entendu. Je dirai presque qu’il n’y a rien de plus normal que le terrorisme. Comment ne pas être terroriste quand on est un Palestinien ? Tous nos rapports guerriers ont été des rapports de terroristes et de résistants. Les résistants étant du côté des plus forts, les terroristes du côté de ceux qu’on n’écoute pas. Les terroristes sont ceux qu’on n’entend pas, car ils sont considérés comme nuls et non avenus. »[1]
Pour Henri Laborit, le terrorisme, et plus généralement
l’agressivité, sont les seules échappatoires offertes à ceux qui sont
contraints à une condition de soumission intolérable et sans espoir.
Comment s’étonner alors de le voir germer, tant dans nos banlieues
ghettoïsées qu’en Palestine colonisée ou dans l’Afrique dévastée ?
Trop tard !
Et
ce n’est pas la multiplication de lois liberticides ou la répression
policière et militaire qui vont arranger les choses. Elles ne peuvent au
contraire qu’exaspérer un peu plus la colère des réprouvés et
témoignent juste du degré de panique qui saisit de vieilles élites
occidentales affolées par la chute de leur empire.
Le seul moyen pour enrayer la spirale infernale du terrorisme et de
la violence serait de s’attaquer aux vraies causes du mal : offrir des
conditions de vie décentes (à travers l’attribution d’un revenu de base
pour tous, par exemple) et quelques perspectives d’avenir aux
populations précarisées, accorder un État aux Palestiniens avec un
retour d’Israël dans ses frontières de 1967, permettre aux Africains de
retrouver enfin leur indépendance, leur dignité et de quoi manger.
Mais c’est trop tard, les choses sont allées trop loin. Les
élites du vieux monde ont fermé toutes les portes de sortie et sont
passées de l’autre côté du rationnel, là où sévissent les pulsions
mauvaises et les crispations meurtrières. La frénésie de
mesures antiterroristes, les mises sur écoute généralisées et
affranchies de toute décision judiciaire en sont autant de preuves. Tout
comme les magouilles avec des puissances finançant le terrorisme (sinon
directement avec des groupes terroristes eux-mêmes), les massacres
aveugles de civils par des drones, la justification même plus voilée de
la torture à grande échelle, les guerres pour les matières premières, la
condamnation à mort de milliers de migrants…
De fait, la transition vers le monde d’après ne peut plus
guère s’épargner un long et douloureux passage par la violence, le
terrorisme et la guerre. Ce n’est même plus une prédiction,
mais le constat d’évidence d’un processus déjà enclenché. La seule
nouveauté est qu’il menace désormais directement nos propres territoires
qu’on croyait préservés.
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