Gidéon Levy
« Sur quel ton et dans quelle
langue faut-il vous le dire ? » demande
Gideon Levy aux Etats-Unis et à
l’Europe, dans un article publié par le
quotidien Israélien Haaretz, exigeant
des sanctions contre Israël, seules à
mêmes, souligne-t-il, de parvenir à une
égalité des droits entre Israéliens et
Palestiniens.
Les Américains et les Européens
ont essayé la voix de la raison et ils
ont échoué. Ils doivent désormais
s’adresser à Israël dans le langage
qu’il comprend le mieux (et ce n’est pas
l’hébreu).
S’il y a une communauté
internationale, qu’elle le fasse savoir
rapidement. Car pour le moment il est
clair qu’il n’y a plus aucune
intervention internationale en Israël.
les Américains ont plié bagages, les
Européens ont renoncé, les Israéliens
s’en réjouissent et les Palestiniens
sont désespérés.
De temps à autre, un pape ou un
ministère des affaires étrangères vient
faire un petit tour (celui de la Norvège
était ici la semaine dernière), prononce
du bout des lèvres quelques mots, pour
la paix, contre le terrorisme et les
colonies, puis disparait comme il était
venu. Au bout du chemin, le roi a été
remplacé par un clown (référence à
Shakespeare). Ils abandonnent le conflit
aux soupirs des Palestiniens et
l’occupation aux mains d’Israël, à qui
on peut faire confiance pour la faire
fructifier d’une main encore plus ferme.
Ce retrait de l’humanité est
inacceptable : la communauté
internationale n’a pas le droit de
laisser les choses en l’état, même si
c’est le souhait le plus ardent
d’Israël.
La situation actuelle n’est pas
acceptable au 21ème siècle. Il y a
effectivement de quoi se lasser s’il
s’agit de creuser le même sillon et de
faire les mêmes propositions dérisoires
à un sourd. L’échec américain montre
qu’il est le temps d’adopter une autre
méthode, jamais tentée à ce jour. Le
message, tout comme les moyens de le
faire entendre, doit changer. Le
message doit concerner les droits
civiques et l’on doit recourir aux
sanctions pour le faire entendre.
Jusqu’à présent on a utilisé la
flagornerie à l’égard d’Israël, lui
présentant une carotte après l’autre
pour tenter de lui plaire. Cela s’est
avéré un échec retentissant. Cela n’a
fait qu’inciter Israël à poursuivre sa
politique de dépossession. Le message
aussi a failli : la solution à deux
Etats est devenue fantômatique. Le monde
a essayé de lui redonner vie
artificiellement. Les propositions se
sont succédées, étrangement similaires,
d’une feuille de route à l’autre, du
Plan Rogers aux navettes de John Kerry,
et chacune a fini en poussière dans un
tiroir. Israël a toujours dit non, seuls
ses prétextes et conditions présentant
des changements : la fin du terrorisme
ici, la reconnaissance d’un Etat juif
là.
Et pendant ce temps le nombre de
colonies en Cisjordanie a été multiplié
par 3 ou 4, tandis que la brutalité de
l’occupation augmentait, au point que
des soldats se mettent à tirer sur des
manifestants par pur ennui.
Le monde ne peut collaborer à ceci.
Il est inacceptable, au 21ème siècle, de
la part d’un Etat qui prétend faire
partie du monde libre, de priver une
autre nation de ses droits. Il est
impensable, carrément impensable que des
millions de Palestiniens continuent à
vivre dans ces conditions. Il est
impensable qu’un Etat démocratique
puisse continuer à les opprimer de la
sorte. Et il est impensable que le monde
regarde cela et laisse faire.
La discussion sur les deux Etats doit
maintenant se transformer en une
discussion sur les droits. Chers
Israéliens, vous avez voulu l’occupation
et les colonies — eh bien restez
enfermés à l’extérieur — Restez à
Yitzhar, enclavez-vous dans les
montagnes et construisez tout votre saoul
à Itamar. Mais vous avez l’obligation
d’accord tous leurs droits aux
Palestiniens, exactement les mêmes
droits dont vous jouissez.
Egalité des droits pour tous ; une
personne, un vote : tel devrait être le
message de la communauté internationale.
Et que pourrait répondre à cela Israël ?
Qu’il ne peut y avoir égalité des droits
parce que les Juifs sont le peuple élu ?
Que cela mettrait en danger la
sécurité ? Les prétextes seraient vite
écartés, et la vérité nue éclaterait au
grand jour : sur cette terre, seuls les
Juifs ont des droits. Une affirmation
qu’il n’est pas question de prendre pour
argent comptant.
C’est aussi toute la manière de
s’adresser à Israël qui doit être
changée. Tant qu’ils n’ont pas à payer
le prix de l’occupation et que les
citoyens ne sont pas sanctionnés, ils
n’ont aucune raison d’y mettre un terme
et même de s’en préoccuper. L’occupation
est profondément ancrée au sein
d’Israël. Personne n’en est à l’écart,
et l’écrasante majorité de la population
israélienne souhaite continuer à en
profiter. C’est pourquoi, seules des
sanctions peuvent nous faire prendre
conscience de son existence.
Oui, je parle des boycotts et des
sanctions qui sont largement préférables
aux bains de sang.
C’est la vérité, même si elle est
amère.
Les Etats-Unis et l’Europe se
sont suffisamment prosternés devant
Israël. Et sans aucun résultat,
malheureusement. Dorénavant, le monde
doit adopter un autre langage, qui sera
peut-être compris. Après tout, Israël a
prouvé plus d’une fois que le langage de
la force et des sanctions est son
langage préféré.
http://www.haaretz.com/opinion/.pre...
(Traduit par CAPJPO-EuroPalestine)
CAPJPO-EuroPalestine
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